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mercredi 24 octobre 2012

Restaurant La Signoria, Calvi, le diable est dans les détails



Il y a des allées qui rassurent surtout ceux qui les empruntent, des jardins où s’ébattent des sculptures et où bruissent partout les fontaines ; il y a des tableaux qui réjouissent, surtout perdu au pied de quelques collines corses, du côté de Calvi, et c'est indéniablement le cas à La Signoria






C’est dans cette ancienne demeure génoise du 18ème, aujourd’hui fleurdelysée, que nous avions décidé de nous taper La cloche des vacances. Je l’ai choisi sur conseils avisés et parce que j’avais remarqué depuis quelques temps déjà que le chef travaillait des produits corses pas forcément trouvable ailleurs et enfin parce que l’on nous a dit le plus grand bien de la carte des vins.

Arrivé sur cette terrasse exclusive à la tombée du jour, début septembre, nous voilà totalement accablé par une chaleur suffocante, alors un premier conseil, en été, ne réservez votre table qu’après 20-21h.   Mais tout ceci est de notre faute, on voulait absolument profiter du parc, de la vue, des collines qui encadrent la demeure, n’en tenons aucune rigueur.



Nous passons à table et nous rafraîchissons à grand coup de citronnade corse (aux tarifs relaizéchateaux extravagants et désagréables) et nous nous jetons, avides, sur le menu et choisissons à la carte pour en profiter un maximum.
Pour ma part je fonce sur deux choix que j’avais déjà repéré depuis quelques temps : les langoustines du cap corse et le veau corse de « Zilia » et grand bien m’a fait car ces deux produits étaient impeccables.

On pioche avec difficulté dans le livre de cave, absolument formidable de profondeur sur la région, avec tous les grands, tout les en-devenir sur une série de millésime. Etonnant alors de nous envoyer un sommelier débutant, qui plus est quand on a réservé de la part de deux grands sommeliers de l’île…ce jeune est sympathique et connaissait son sujet mais pas suffisamment à mon goût. On trouve tout de même une très belle quille, un Clos Colombu Ribbe Rosse 2004. Avec une pointe d’oxydation superbe qui donne du gras et une finale puissante comme il faut pour un beau blanc.

Nous débutons pour une autre fraîcheur de bon aloi, un gaspacho terrible, plein de tomate et de secrets, il est justement relevé, herbacé et renforcé en cela par une quenelle de glace basilic, ça démarre bien…





Mais passons aux choses sérieuse avec ces « Langoustines du Cap Corse cuites à la plancha, fleurs du potager farcies, espuma de petit pois à la noisette ». Première impression, l’assiette est sobre, pour ne pas dire minimale, deuxième impression en croquant dans la petite queue perdue : c’est superbe !

C’est ce que je venais chercher ici, le produit et ces langoustines sélectionnées et cuites à la perfection par Thomas D’Arcangelo sont à la hauteur. Elles développent un goût d’une finesse superbe et personnellement je préfère ce gabarit aux énormes que l’on trouve ici ou là sur les plus grandes tables du monde. Le jus de carcasse ajoute un trait marin, les fleurs de courgettes farcies d’un mélange de chair de langoustines et de légumes du jardin sont deux petits délices. A côté de cela, l’espuma a du mal à exister mais il accompagne très agréablement ces rares crustacés. L’assiette a l’air dépouillée, mais il y a largement de quoi faire finalement.




Nous voilà installés, on demande alors au service si l’on peut prendre un peu plus notre temps…tant il est vrai que depuis le début du repas tout roule un peu trop vite pour nous, sans être désagréable pour autant. Le plat arrive tout de même dans la foulée, toujours aussi frêle, mais avec une viande qui me parle de suite. Je sais, je sens que cette bête là ne peut venir que de Corse, ou, à minima de superbe élevage.

Avec « Le veau corse de « Zilia » cuit au sautoir, penne zita en gratin, fleurs de pâtisson, jus à la nepita » on est loin du veau de lait, des chairs fluettes et on se régale de cette viande de caractère. Ce qui est formidable avec les vrais produits de cette région, c’est qu’ils ont un vrai goût, à eux et ça j'adore. Le jus à la nepita (une sorte de marjolaine sauvage) ne fait qu’ajouter au côté local mais c’est sur le reste que le bas blesse....


Car j’attendais bien plus de ce plat et je suis presque certain que je ne serais pas le seul, parce qu’il faut avouer qu’à part en goût (ce qui fait presque tout, on s’entend) cette assiette est un peu triste. Déjà sur le gratin de penne, non pas que je m’attendais forcément au gratin de Fréchon mais à plus de travail certainement. Bref je les aurais bien vues fourrées de rogatons du veau ou autres car 8 pennes, même d’une bonne marque, juste cuites à l’eau, ça n’a jamais fait un accompagnement. Ni mêmes quelques feuilles de salades ou un pâtisson au jus d’ailleurs. Quel dommage, contrairement au plat précédent je me suis arrêté en plein milieux du chemin.

Surtout au vue des tarifs pratiqués dans la maison, surtout quand les erreurs de services s’accumulent sur notre table. Il faut avouer que nous étions avec notre fille de deux et demi, qui pourtant rompue aux repas à rallonge n’en pouvait plus, ce qui a sans doute joué. 
Il faut vous dire aussi que l’on a pris un dessert à l’invite des serveurs, en demandant expressément 10 minutes de pause ce coup-ci, 10 minutes se transformant en 45 (et je n’exagère pas), trois quarts d’heures pour voir arriver ça… 


Ce dessert nommé « Marie-Baba » n’est autre qu’un baba à l’alcool de myrte, mais que c’est surtout une assiette clairement bâclée…que l’on ose servir….et que l’on a essayé de nous faire passer pour un dessert pour deux (donc facturé deux fois…on rêve). Non pas que ce dessert soit mauvais, encore heureux, c’est juste une sorte de pâte à choux défoncée, gavée d’une bonne crème gourmande sur laquelle on a jeté deux pipettes d’alcool et quelques fruits rouges, mais ça ne vaux ni le prix, ni l’attente, ni le statut du chef et de l’adresse.

Bref vous me trouverez sans doute assez remonté, ce qui est rare chez moi sortant de table, mais c’est surtout car j’attendais plus de cette adresse, comme j’attends plus depuis des années des meilleures adresses sudistes, j’en ai un peu marre de ces adresses françaises où sans des revenus de russes, on ne se fait plus d’immense plaisir déjà, mais on a en plus l’impression que l’on se fout clairement de notre gueule.

Reste les produits fabuleux je l’ai dis et je le redis, reste les lieux, magiques, le talent du chef, certain mais à qui je conseille vivement d’arrêter de faire à manger pour tout le monde, essayant de coller aux palais des ricains, allemands et autres brésiliens mais de faire sa cuisine, une cuisine de son île et d’aller plus loin, beaucoup plus loin, avec ces produits je suis certain qu’il le peut.

Quand au service, s’ils sont jeunes, beaux et souriants, sans doute sortants de grandes écoles, s’ils n’ont pas envi d’être là, ils doivent rester chez eux !  Si toutes les procédures (clairement écrites et apprises par cœur) semblent maîtrisées, leurs applications est assez moyenne, sans compter les choses que j’ai entendu pendant la dernière heure de ma présence là-bas qui sont presque honteuses….mais je n’en dirais pas plus.

Si je me permets de relever tous ces désagréments c’est que je l’ai dit sur place au maître d’hôtel, le plus calmement possible,  à la fin du repas et ce n’est pas tant pour moi, qui accompagnées de mes belles durant 3 semaines de rêve a pris suffisamment de plaisir pour ne pas en faire une maladie.
Je ne pense absolument pas non plus a l’Homme (qui peut donc être une femme) qui gagne un salaire mensuel à 5 ou 6 chiffres, qui lui finit malheureusement par s’en foutre ou ne plus faire attention, non je pense aux jeunes, aux néophytes, ou simples touristes qui souhaitent se faire leur table de l’année, le plaisir de la décennie, le craquage du siècle, eux aussi ont le droit de venir il me semble et à ce tarif il FAUT qu’ils sortent ravis de ce genre d’adresses, sinon ne nous étonnons pas qu’ils ne remettent plus jamais les pieds dans un étoilé, dans un « relais et châteaux », voire qu’ils crachent dans la bonne soupe des « adresses de qualités ».



Heureusement je me suis soigné depuis, j’ai décidé d’arrêter les « grandes » tables sudistes  (mise à part celles du côté d’Arles ou de Menton) et je me suis plongé dans la contemplation de cet arbre torturé qui ma ramené suffisamment de zen et m’a rappelé combien il fallait de patience et de travail pour arriver à une émotion et pour dompter les détails…

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