Passer son réveillon au restaurant m’a toujours semblé être une idée saugrenue, surtout si c’est un choix par défaut et plus encore quand on a des ami(e)s sincèr(e)s et/ou une famille-lumière qui se réunissent par ailleurs.
Mais il faut avouer que cette année, si je n’avais pas eu mieux à faire, j’aurais très certainement craqué pour ce menu du 31 à faire défaillir plus d’un épicurien.
Cela se passait chez le très souvent (ici du moins) encensé Bistro des Saveurs, à Obernai.
Pourquoi aurais-je pu me laisser tenter ?
Sans doute à cause de la volonté de la maison de faire réellement un menu de gala, pour fêter une nouvelle année certes, mais surtout car celle-ci sera la dixième de cette table et qu’à cette occasion, le chef avait choisi de nous présenter 10 de ces créations millésimées, avec au menu :
Le Foie Gras d’oie d’Alsace (2002)
Foie Gras, Raviole, Vapeur (2003)
Gelée tiède, foie gras, Poule (2006)
Potimarron soufflé, Crème de noisettes (2007)
Conchiglioni / Truffe Noire (2004)
Turbot entier cuit lentement, Epeautre, Safran (2010)
Côte épaisse, Chevreuil, Goût terre (2005)
Coulomminer Fermier Rotschild / Truffe d’Alba (2008)
Passion, Meringue, Or (2009)
Bonbon Alto del sol bio (2012)
159 €
Contre cette belle volonté signée Thierry Schwartz, combien de solutions de facilités ? Combien de menus "vites-torchés" pour abandonnés-d'la-saint-sylvestre ? bien trop à mon goût, surtout au vu des coûts.
Parce qu’il n’y a rien de pire que d’arriver dans un restaurant bondé-collé-serré et parce qu’il est de notoriété publique que la trop grande majorité des restaurants profitent de l’occasion (qui a dit : comme à la saint-valentin ?) pour vous assaisonner copieusement ; j’ai presque toujours préféré mettre le tiers, le quart ou la moitié et m’éclater avec mes camarades d’existence.
Jamais je ne dis jamais pourtant, et quand on se replonge dans certains souvenirs encore vivaces, on se rend compte que tout n’est pas à jeter dans le même seau, et qu’en certaines occasions ou à partir d’un certain âge, cette solution peut-être conseillée, surtout quand on tombe sur un restaurateur sérieux et amateur de symbolique, qui met tout dans la balance pour vous faire passer un moment marquant.
Ce fut le cas avec ce menu daté du fameux 31 Décembre 1999 :
Foie Gras d’Oie en Croûte
Gâteau Froid de Pomme de Terre et de Grains de Caviar
Macédoine de Légumes et Médaillon de Langouste, la Traditionnelle Mayonnaise
Raviole fourrée au Foie Gras de Canard et de Truffe Noire Fraîche
Noix de Saint-Jacques bardée d’une Arlequinade de Légumes, le Croustillant Farci au Corail, Beurre Blanc parfumé au Vinaigre de Balsamique
Poitrine de Faisan, poêlée à la Choucroute et aux Raisins Blancs, Bacon grillé, Croûton farci
Carré de Veau « nourri sous la mère » rôti dans la cocotte Staub, Ris et Rognon, Sauce au Vin de Porto, Purée Légère de Topinambours
Douceurs sucrées de la Saint-Sylvestre 1999-2000
Ce menu est signé par un ancien étoilé mythique de centre-Alsace, Patrick Fulgraff en son regretté « Fer Rouge » et il suffit de le lire pour comprendre la sincérité de ce chef quand il se décide à vous régaler. D’ailleurs pour ceux qui le ne savaient pas, je vous invite à suivre ce lien vers ses nouvelles activités (ICI)
Et si je n’avais qu’un conseil pour ceux qui veulent absolument se faire dorloter pour passer à la nouvelle année : c’est de ne pas le faire à moitié ! et en Alsace quand on veut aller le plus loin et le plus haut possible, on prend la route d’Illhaeusern, comme certains d’entre nous en fin 1993, rappelons-nous du menu :
Aumônière de saumon mi-fumé, mi-mariné, blinis au caviar d’Iran osciètre
La chartreuse de canard colvert au foie d’oie et les aiguillettes laquées en salade
La coquille Saint-Jacques poêlée et le velouté de poireau-pomme de terre aux truffes blanches du Piémont
La paupiette de turbot de ligne aux langoustines, sauce à l’infusion de feuilles de citron vert
Le homard farci à la créole et son bouillon aux aromates
Le carré de veau de lait rôti entier accompagné d’une truffe en feuilles de chou
La soupe de fruits exotiques au lait de coco et Rhum ‘’Trois Rivières’’
L’assiette gourmande de la Saint-Sylvestre au thym et poivre de Sechouan
Vous le voyez tant qu’à faire, autant aller jusqu’au bout de la route car les déceptions se trouvent très souvent à mi-chemin. Alors restez seul et bien accompagné chez vous, avec des amis et de la famille aimée autour d’une simple tablée, ou alors accoudé aux banquets des dieux mais surtout, allez-y à fond, amusez-vous, partagez-tout, on se sait jamais vraiment combien de temps ce simple délice nous sera accordé.
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