Mes deux derniers repas en ces lieux doublement étoilés - et qui le sont
restés depuis la dernière fournée du Michelin - étant séparés de moins de trois
mois et étant constitués de multiples plats et délices, j’ai décidé, pour
« réduire » mes envolées, de vous en sélectionner deux chez chacun de
ces grands chefs et dans ces maisons éternelles de la régalade française.
On commence
par le plus proche de ma base et par le repas le plus ancien, daté de fin
novembre 2016 au 64°, à KB. Si je ne devais retenir que deux plats de cette
envolée forestière en mode-chasseur, ce serait ceux-là et surtout le premier,
incontestablement un des plus grands plats de chasse de ma carrière de goûteur.
Il nous arrive donc à table une ballotine de (5) gibiers à plume, parfumée au
genévrier qui brûle quelque peu autour, servie avec un beurre noisette aux
baies d’alisier. En bouche c’est vraiment aussi formidable qu’à l’œil, j’ai
adoré ce jeu d’amertume qui coiffe et calme, sans rien enlever, les goûts et
les textures de cinq gibiers entremêlés, oui, vous avez bien lu, cinq,
sarcelle, grouse, perdreau, colvert et faisan. Quelle joie, quel équilibre,
quel goût dompté. Ce fut certainement un
des 5-10 meilleurs plats mangés en 2016.
Ensuite on est presque plus classique, un lièvre à la royale à sa façon,
très précis, très policé, pensé et repensé, décliné à foison. Le premier jet
est une tranche du lièvre profondément mêlée selon la recette ancestrale, l’apport
d’une large rouelle de moelle la rend plus civilisée. Il y a néanmoins toutes
les fragrances du plat historique dans ce premier jet. Le second est un maelström
d’épaule confite et dépiautée, siégeant dans un jus moins profond mais tout
aussi puissant ; ce sera l’assiette la moins formidable du triptyque,
c’est dire. Car nous finirons sur le filet du lièvre, cuit rosé et éparpillé
dans une sauce dont j’ai oublié la composition mais dont je n’oublierai pas de
sitôt la surprise. Terminer tout en pureté, après ces virulences, par ce filet
à peine caressé par la chaleur, avec une sauce « végétale » et que
cela se fasse si naturellement et si intelligemment, c’est du rarement vu.
Difficile de
passer à autre chose de même niveau après ces deux plats, alors pour ne pas
redescendre du nuage étoilé, tapons dans un autre 2 macs que j’adore, cette
Maison Jeunet reprise depuis 1 an, de main de bras-droit-de-maître. Il me faudra
au moins ça.
Ces deux plats datent de mi-février 2017, ils sont tout frais dans mon esprit et s’ils sont moins intenses, moins sexy en diable et moins « as-tu vu mon savoir-faire » que les précédents, on y trouve pourtant un plaisir fou.
Ces deux plats datent de mi-février 2017, ils sont tout frais dans mon esprit et s’ils sont moins intenses, moins sexy en diable et moins « as-tu vu mon savoir-faire » que les précédents, on y trouve pourtant un plaisir fou.
Le pagre de ligne fait
la différence, car il est agréable de changer des habituels bars-turbots-et
consorts. Sa cuisson est vraiment belle, préservant le gras du poisson, un peu
de mâche, tout en étant totalement confit, il part en charpie sous la
fourchette mais surtout pas en miettes. Le sous-vide lui enlève juste sans doute
un peu de goût. Le goût on le retrouvera dans ce jus de poisson et d’un végétal
que je n’ai pas reconnu, mais il fut tellement puissant que, passée la
surprise, j’ai adoré. Mais les piliers de ce plat sont ces petits
bouchons-gnocchis au chou-fleur. Ils escortaient si bien le plat, nous ramenant
sur terre et cajolant la bouche après les folies salines-végétales du jus, ils
sont indispensables et délicieux, comme tous ces petits à-côtés (en craquant,
en tube-gelée), sacrément pensés, mais posés là si naturellement que l’on ne
remarque leur importance qu’une fois le plat terminé.
Le plus
étonnant, finalement, sera la vraie-fausse simplicité du plat suivant,
signature de la maison depuis des lustres…pensez donc, à l’arrivée de
l’assiette, on croirait recevoir du jambon en croûte. Eh oui, du jambon en
croûte…ni plus ni moins. Je vous avouerai que, eu égard à l’intitulé du plat,
j’ai été déçu, vraiment, à l’arrivée de l’assiette, mais 10 minutes plus tard
j’ai applaudi. Attaquons la viande…elle est délicieuse, cela reste malgré tout
le carré d’un beau cochon coupé finement. Puis plus on y retourne, plus on
l’adore, ce morceau qui reprend chair, gras et couenne, cuit à nouveau tout en
douceur et certainement dans son jus (sous-vide again ?). Et, comme d’hab’,
c’est le gras qui change tout et fait tout le plaisir. Ahhh quand je pense à
tous ces c……ns (bip) qui le laissent sur le bord de l’assiette.
Une fois de plus, si le principal est respecté, c’est par ces a-côtés fabuleux que l’assiette s’envole dans les étoiles. Ces cubes façon ‘’pomme-de-terre-carrés’’…il faut les avoir goûtés pour le croire. La première sous la dent provoque une décharge d’endorphine, rien que ça, on a du mal à croire que ces cubes de panisse à la sauge puissent être aussi bons, aussi agréables. J’ai dû en redemander en cuisine car j’ai totalement craqué là-dessus. Le reste des adjuvants de ce cochon gourmand est finalement trop complet, trop complexe pour être retenu, une fois de plus, mais il ne demeure que le plaisir.
Si l’on va au restaurant, qu’on y dépense des petites fortunes, c’est bien pour ça, le pllllllllaaaaaaiiiiisir majeur, celui qui est plus que du plaisir, celui qui mêle envie-patience-découverte-habitude-caresse-violence-complexité-simplicité et, dans ces deux maisons éternelles, jalons posés là sur nos chemins gourmands, vous retrouverez certainement comme moi ce genre de plaisir, si tant est que vous soyez suffisamment branchés sur vos ressentis et vos émotions pour en déceler toutes les sensibilités.
Félicitations aux Chefs Olivier Nasti, dont la ballottine est un évident strapontin vers la 3ème, mais qui ne devrait peut-être pas trop décliner chaque plat en trois assiette (aussi intéressantes à déguster soient-elles) , et au chef Steven Naessens, pour avoir parfaitement repris la main (2 étoiles conservées amplement méritées en comparaison avec mes souvenirs forts de 12 repas au moins à cette table depuis 2002), dans l’assiette déjà, et pour avoir gardé tout le sel et le génie-Jeunet ; attention tout de même au trop-sous-vide qui fait des cuissons parfaites mais qui enlève un peu de goût de vérité à mes sens !!!
Vivent nos Maisons éternelles et nos chemins gourmands !
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