Dans un palace, tant
qu’à faire et pendant qu’il en est encore temps…
Après un samedi soir où
l’on a descendu consciencieusement et par précaution les dernières bouteilles de
champagne froides-tièdes dans un repaire jusqu’à des heures avancées, pour
retenir cette peut-être dernière nuit en démogarchie, et avant d’entendre les
bruits de bottes déferler, rouges-de-rage ou vertes-de-gris, allons voter,
encore un peu bourrés, avant d’aller bruncher.
Pour nous ça ne sera pas
le Lutetia, déjà vu en pareille circonstance, mais plutôt le Shangri La, pour
un réveil de la conscience en format sucré-salé-salé-sucré-abusé.
Dans ce décor grandiloquent et une verrière² de palais anglais, derrière des
vases dans lesquels on peut faire pousser une forêt, sur des marbres de cas
rares, sous un lustre qui fait la taille d’un F2 parisien, l’esprit est cajolé,
on en oubliera presque à quelle sauce l’on va se faire manger ces prochaines
années.
On commence par un peu-beaucoup
de douceur, alors, une petite assiette, piochée à même les buffets (ohhh, comme
c’est populaiiiire), un petit déluge de fruits rouges pas-d’saison mais qui
réussissent le tour de force d’avoir du goût (venus en jet d’une contrée
ensoleillée sans doute), des agrumes en suprême-qu’est-ce-j’t’aime pour
s’éclairer la voix, une madeleine infusion de chocolat pour fondre, un cookie
avec des rochers de caramel coulant mais pris dedans, et un carré de mille feuille avec une crème tellement douce et vanillée que déjà elle panse nos
plaies. Avec un verre de jus de poire, ça nous fera presque oublier ce soir.
Mais pour négliger ce
qui va irrémédiablement suivre, le lundi (à moins que, l’on nous aurait
menti…), il va falloir passer au salé. Toujours en buffets disséminés, on se
laisse aller à mélanger. Et vas-y que je te sélectionne quelques charcuteries
authentiquement ibériques, qui ont dû passer la frontière avant l’éventuel
rétablissement de celle-ci, et tant qu’à faire, goûte de l’asiat’ aussi avec quelques
vapeurs bienvenues, un tartare de poissons-barbares, un feuille roulée-fourrée de pomme et de
coquillages et crustacés et puis finalement, finis par une terrine-de-tête bien
moulée. Avec ça, un thé, noir ou vert, on n’est pas (encore officiellement)
raciste, ça devrait l’faire.
Ensuite, on arrête de se
lever, c’est trop fatiguant, mais alors, hors-isoloirs (le début d’la dictature),
on doit encore faire son choix entre plusieurs sortes d’œufs, des extravagants et des
affligés de banalité, mais rien de très sérieux ni de classique, qui nous
rassurerait en ces temps troublés.
Va donc pour celui en cocotte alors, coulant, aux accents chantants de piperade et de Jabugo, ou celui croustillant, forcément parfait, plus prout-prout-chabada avec la truffe qui va bien et la légèreté-forcée de bon ton. Un peu d’eau fera passer les mélanges assumés.
Va donc pour celui en cocotte alors, coulant, aux accents chantants de piperade et de Jabugo, ou celui croustillant, forcément parfait, plus prout-prout-chabada avec la truffe qui va bien et la légèreté-forcée de bon ton. Un peu d’eau fera passer les mélanges assumés.
Parce que les dernières
heures de confort avant les zones de turbulences annoncées doivent être étirées,
on continuera, Bauhinia Shangri La oblige, par jeter sa fourchette et son
dévolu sur le péri(p)le asiatique.
Pourquoi pas pour une fricassée de lotte au
curry jaune et riz « Nasi Lemak » (ça ne s’invente pas), mais plus
certainement encore pour la spécialité du lieu, un pad thaï aux crevettes, un
assemblage formidable de pâtes de riz sautées, crevettes, œuf brouillé, pousses
de soja, jus de tamarin, radis daïkon, chou blanc, cacahuètes, ail et citron
vert.
Avec ça on aurait pris du champagne si on en avait pas abusé encore quelques heures auparavant et si les impôts n’étaient pas confiscatoires… J
Avec ça on aurait pris du champagne si on en avait pas abusé encore quelques heures auparavant et si les impôts n’étaient pas confiscatoires… J
Mais bon, devant le
désastre annoncé pour 20h, il faudra repasser par le sucré pour adoucir les
mœurs, alors on se rere-rue vers la pâtisserie, au-ssi !
On fait provisions de sucre avant l’arrivée des chars russes, avec un palmier caramélisé, une tatin de dingue qui l’est encore plus, une tartelle délicieusement fourrée, aux framboises, une autre au citron, une gaufrette super-chouette et un peu de crème triple…on ne sait jamais !
Avec ça, un peu de
liqueur d’oubli, ou, à défaut, un petit cocktail temesta/free base/absinthe, et
tout devrait bien se passer…faites-moi confiance !
Enfin, suffisamment
étourdis, recouchez-vous vite, dans une suite du dit palace ou dans une demi-chambre
de bonne, mais recouchez-vous avec celui ou celle que vous aimez, tirez les
rideaux, jetez la télé, et attendez le mardi pour ressortir et leur montrer
que, d’un extrême à l’autre du spectre, ils peuvent toujours tenter de nous
enlever une once de notre liberté…y en a qu’on essayé…à moyen-long
terme, ils n’ont jamais gagné !
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