Vous ne comprenez rien à ces satanés « vins nature » et vous en avez ras-le-bol des vins déviants, j’ai trouvé pour vous un sacré médicament, la belle exception qui atomise la règle.
Ce digne vin des Baux de
Provence, qui ne veut plus, depuis ce millésime géant dans la région, s’assujettir
aux règles du jeu, est pourtant classé en vin de table.
Pourtant dès le
commencement, après lui avoir laissé une heure tranquille, bouteille débouchée,
il s’échappe du verre une quantité de choses réjouissantes et vraiment
entêtantes, dont beaucoup de framboise, une pointe de tapenade, et de l’épice.
Si la robe est bien pleine, elle ne manque pas de lumière.
Mais c’est sans doute en
bouche que cela me scotche le plus, elle est parfaite dès le départ et elle
balance un coulis de fruits rouge fringant, du graphite et de la joie.
Tellement à l’équilibre
entre pureté et complexité, tellement bien Nature qu’elle le lui rend bien, un
magnifique papillon passant l’après-midi à humer le verre et à fouiller du bout
de la trompe (son proboscis pour les pinailleurs naturopathes) sur les rebords
quelques gouttes de ce nectar que l’on partagea avec lui et un agneau, bien
mieux nourri, mais bien plus trépassé pour le coup, un autre digne morceau de
bravoure paysanne. Il s’agit d’un joli petit train de côtes d’agneau de
Sisteron, frottées avec amour à l’huile des Baux et à la tapenade, posées sur
de large tranche de tomate cœur de bœuf et escortées de quelques artichauts violets
qui devront cuire et sécher avec le jus de la bête pour un plaisir certain.
Le vin continue
d’évoluer au nez, et quelques heures plus tard apparait la mûre, l’encre de seiche,
et un peu d’alcool volatil qui ne gâche pas le plaisir car il reste toujours
cette idée fort plaisante de confiture de vieux garçon et d’herbes sauvages.
La bouche, elle, reste fine en entrée et gagne
en patine sur le final. Elle est de plus en plus élancée, avec du souffle. Elle
reste droite et « pûre » et gagne en persistance et en force, les
évocations de prune qui se révèle au bout de 6 h. ne sont pas pour me déplaire
car elles ne sont qu’évocations.
Il reste pour moi comme
un vin parfait pour la saison, plein de soleil et de vie, plein de jus et de
caractère. On l’accueille avec d’autant plus de bonheur après quelques fadaises
en blancs-rouges-rosés, dont je ne parlerai pas ici. Il se fait génial sur
l’olive et se boit facilement, rien que pour lui, même en plein après-midi.
Mais, le soir, avec ces côtes bien grasses aux gras-grillé, on touche au sublime, l’apport de
la tomate grillée et de l’artichaut barigoule concentrée ne faisant que
rapprocher l’assiette du verre, et le tout de nos gosiers avides.
Avec des vins comme
celui-ci, la (bande à) Nature a de beaux jours devant elle, il faudrait
« simplement » que la grande majorité des faiseurs se rapproche de ce
modèle, mais rien de moins simple et de moins évident tant l’équilibre de ce
vin est celui d’un funambule, balloté par les vents du Val d’Enfer.
En tout cas, le premier
dégustateur-à-vins-classiques, catégorie dans laquelle je me place, qui fait
les reproches habituels à ce type de vignerons, je ne pourrai plus jamais le
prendre au sérieux. Cette cuvée a plus de pureté que bien des vins et des
étiquettes rassurantes et il est, visiblement, taillé pour la joie et la garde,
la vraie, la grande.
2 commentaires:
miam !
rien que de vous lire est un réel plaisir pour tous les sens.
henri Milan
Merci Henri Milan, avec des vins comme celui-ci, les sens sont déjà bien exaltés ! Félicitations, et que vive les beaux (vins) de Provence.
AntoineM
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