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mercredi 18 décembre 2013

Du ris pour les fêtes, vive la crise !


Le ris, de veau bien sûr, il ne faut pas exagérer non plus…parce qu’à force de la craindre et de la psalmodier, on risque de se laisser aller et de ne jurer plus que par elle : la crise.
Mais c’était sans compter sur l’armée d’épicuriens que compte la France ; alors, si pour beaucoup elle est catastrophe, pour d’autres, mieux ancrés dans leurs besoins primaires, elle est source d’idées gourmandes.

Et puis, comme le caviar n’est pas meilleur à la louche, et parce que le turbot-truffe en tranche épaisse, les baignoires de homards et la volaille de Bresse au vin de Margaux (le Château hein, pas l’appellation) n’est en rien obligatoire, et parce que le ris de veau est un abat-bon-marché des plus noble qui soit, j’ai décidé de vous en remettre quelques-uns en bouche en cette fin d’année et, pourquoi pas, de vous donner des envies pour les fêtes.




Commençons par la base, l’ultra-classique, avec cette recette-simplette, juste braisée au muscat de Beaumes-de-Venise, du chef Philippe Boucher (Avignon-Le Pontet), qui se goûtait ainsi en juin 2011 :
« Ici, vous le voyez, il est d’une netteté totale (pas une goutte de sang), d'une blancheur appétissante, avec juste ce qu’il faut de rebondissement sous la dent pour ne pas en laisser une miette. La sauce est sirupeuse, la brunoise de légumes sert de support et à modérer les richesses. »


Une fois que vous avez compris cette nécessaire notion de pureté et de blancheur, on peut aller un peu plus loin, tout en restant dans l’épure totale, comme cette recette de l’Auberge Frankenbourg, datée de fin mars 2013 :  
« Il est légèrement croûté pour améliorer encore le plaisir, et posé sur un céleri traité en risotto, avec le parmesan qu’il faut pour rappeler le plat, mais aucune trace de riz. Le coulis de laitue fait le lien et le quinoa sert de faire-valoir craquant. »




Il faut dire que le chef Sébastien Buecher est un spécialiste de l’exercice, on se rappelle d’ailleurs en avoir apprécié un autre chez lui, en fin 2009, avec une croûte et une galette de maïs, un joli jus et quelques champignons.
En se remémorant cela, nous revient forcément le ris de veau signé Haeberlin, dégusté dans un menu-déjeuner de décembre 2010 ; celui-ci, plus classique mais plus champignon aussi, était toujours croûté mais légèrement citronné, et servi sur un lit de purée grand-mère et une large tombée de girolles-chanterelles.


Maintenant que vous avez enregistré que la précision de la cuisson de vos ris de veau fait tout, vous ne pourrez plus ignorer, après avoir goûté les deux dernières versions, que les champignons, et surtout les morilles, font un accord parfait et des plats inoubliables.   

En avril dernier, j’ai eu la chance d’apprécier la version signé Emmanuel Renaut de Megève, ce ris de veau était « posé sur un lit de morilles, accompagné de quelques carottes confites et d’une mousseline de noisettes. Tout est très lisible et absolument pas surprenant, et c’est tant mieux, car c’est le plat qu’il me fallait à ce moment de l’année et de la journée…Le jus à la crème est un nouvel appel au vice auquel je réponds avec appétit et envie ! »


Mais le plus grand plat de ris, qui est aussi un des plus grands plats de ma vie de gastronomaddict, c’est bien cette « nouvelle » version de la mythique brochette Margaridou, reprise d’une recette de Suzanne Robaglia, vieille d’un siècle, par Régis Marcon et re-reprise par son fils, Jacques, un plat inoubliable, dont je me suis délecté en juillet 2010.

« A peine arrivé à table, on ressent quelque chose, comme si on avait enfin trouvé ce qu’on recherchait depuis longtemps. L’assiette est formidable, un vrai paysage, un jardin japonais pour gourmet, nous plongeant dans un champ de sérénité et d’envie ; on se retrouve dans un petit nuage de senteurs et à la première bouchée, on a du mal à y croire.

C’est puissant en bouche et les morilles sont les meilleures jamais mangées, le cromesqui coule d’un extrait de plaisir forestier, le ris de veau ajoute le moelleux extrême et craquant et le jambon de pays joue l’arbitre. Car c’est bien la vision du fils de la célèbre brochette Margaridou qu’on déguste là, j’avais déjà goûté la version du père en 2006, et il faut bien avouer que celle-ci la surpasse allégrement.




 Ce plat est tout bonnement inoubliable : le chef qui vient vous remettre une rasade de ces champignons divins, le fumet qui se dégage du beignet de morilles, quand on le casse de la fourchette, le mariage de déraison qu’on se fabrique dans la cuillère à sauce, la comblant de morilles et de ris, l’imbibant de ce jus puissant, et la libération quand on engouffre le tout…[trois ans et demi] après, les sensations sont encore intenses et les goûts toujours là. Merci Jacques Marcon ! ».

Vous le voyez, il y a de la noblesse partout, et même de bien meilleure surprise qu’avec beaucoup de produits d’un luxe dévoyé, alors, si, pendant quelques temps encore, on doit se rabattre sur le ris de veau, ou le foie du même animal, sur la tête de veau ou la cervelle au lieu de nous rouler dans le caviar, cela ne va pas déranger les joyeux épicuriens, bien au contraire…

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