Je vous l’ai déjà dit et
répété, pas besoin de produits d’une rareté-totale quasi indécente, ni de 8
serveurs par table et encore moins d’or au plafond et de cachemire au sol pour
parler de gastronomie, « on n’est pas là pour manger les
rideaux », on ne veut pas manger le dernier turbot de 5 kg et on n’aime
pas manger avec le service sur nos genoux, nous ce qu’on veut c’est passer un
moment de gastronomie véritable, et si on pouvait se détendre complétement
pendant ce temps, on serait pas loin du paradis.
Pour ce faire le paradis
du « sérial bâfreur détendu du gosier et pas pincé du cul », à
Barcelone, se trouve très certainement dans la taverne secrète et planquée au
milieu de la Barceloneta : La Cova Fumada.
C’est typiquement le
genre d’adresse authentique qu’il FAUT faire pour comprendre la gastronomie et
l’art de (mieux) vivre local. Ce sont les adresses que pas mal de guides ne
connaissent pas, ou qu’ils oublient, alors pour la dénicher rien de mieux que
les blogueurs sérieux et patentés (par l’appât du gain surtout), alors rendons tout
de suite à César (ou à Vincent Pousson en l’occurrence, récompensé par la RVF
en janv. 2015 et déjà encensé ICI, chez moi, en déc. 2012 soit dit en passant)
ce qui lui appartient.
C’est grâce à lui que j’ai découvert que cette adresse était exactement celle que je cherchais ; c’est aussi grâce à Serge Thorn et son article dans son blog Hedofoodia (dont nous parlerons un jour sur ce blog) que la décision de changer la totalité du programme de nos soirées barcelonaises a été prise.
C’est grâce à lui que j’ai découvert que cette adresse était exactement celle que je cherchais ; c’est aussi grâce à Serge Thorn et son article dans son blog Hedofoodia (dont nous parlerons un jour sur ce blog) que la décision de changer la totalité du programme de nos soirées barcelonaises a été prise.
Mais trêve de
circonvolutions, il ne vous reste plus qu’à trouver la porte d’entrée, bon
courage car elle est quasi aveugle, sans aucune enseigne autre que celle que
vous découvrirez…en sortant, après une petite heure de bonheur.
On pense arriver devant une grande salle à manger familiale et c’est ce qu’elle
est quelque part. Suivant le meilleur conseil du César local sus-cité (ce n’est
pas sale) donné entre les lignes : il faut s’y faire sa place. Alors,
comme si on était déjà venu là toutes ces dernières semaines, vous tombez la
veste à l’entrée, la gardez sous le bras, vous entrez comme si de rien n’était
et posez votre coude le plus solide sur le bar collant. Là, sans hésiter, vous
commandez à boire rapidement et l’une ou l’autres spécialités posées sur la
vitrine. Pour faire comme tout le monde, ne manquez pas la Bomba qui semble
avoir été inventée ici au siècle dernier : c’est une boule de purée de
patate, plus ou moins ragaillardie de porc semi-invisible au cœur, boule pannée
puis frite à l’huile et servie avec une louchette d’aioli pas discret pour deux
sous. Dire que c’est bon est un peu triste, c’est délicieux de simplicité, ça
donne une soif pas possible, tant et si bien que la bière s’évapore toute
seule. Pendant ce temps, négociez en mauvais anglais le nombre de couvert
nécessaire, au-dessus de 2 bon courage, car aucune réservation n’est prise
ici.
Là on vous installe sur
un morceau de table, que vous partagez avec la population locale qui vous
regarde du coin de l’œil et avec laquelle on échange le sourire de connivence.
Le plus dur est à venir désormais, car il faudra choisir, et pour ceux qui
causent pas catalan, bon courage, car il n’y a qu’une carte pour toute la salle
et elle est accrochée au mur. Allez-y, lâchez-vous, commandez, commandez autant
que vous pouvez, car vous ne saurez pas si votre chance de goûter à cette
gastronomie rieuse repassera. En effet, les horaires d’ouvertures ici sont
assez improbables (genre de 09h09 à 15h15 et de 18h08 à 20h36, fermé le samedi
et dimanche, je n’exagère qu’à peine) alors faites-vous plaisir dès la première
commande.
Pour nous en ce jour, ce
fut un peu léger, mais carrément génial. Par ici les sardines ultra-fraîches en
escabèche, fondantes, panurées, vinaigrées, rapicolantes. Pour se détendre
les mandibules, on piochera du bout des doigts ces rouelles de boudins noirs
impeccables, grillés, enrichies en oignon et autres détails bienfaisants. Pour
faire couler, il faudra se rabattre sur le vin en pichet qui sort du mur
derrière le bar, en blanc ou en rouge, pas de surprise, c’est
« léger-frais-gouleyant », un personnage-alsacien sorti de ma
jeunesse épicurienne aurait dit « ça s’boit ça s’pisse » et c’est
exactement ça, mais ça donne le sourire en plus.
L’autre grand moment de
régalade est d’échanger entre le pain à la tomate maison, superbe de simplicité
et ces petites saucisses de chorizo absolument addictives. Ca croustille, ça
tomate, ça aille la gueule et la saucisse éclate sous la dent pour laisser
s’échapper jus et chair de cochon très bien relevé, on s’en régale et on enchaîne
les godets.
En même temps il ne faut
pas oublier de piocher dans ces petites moules sèches et pourtant délicieuses,
parfaitement relevées aussi par une mayo-maison pas si lourde que ça. Et puis
il faut aussi attaquer ces fabuleuses « gambas », crevettes rouges et
intenses, aussi fraîche que la rosée, dont on a l’impression que les antennes
bougent encore. Arracher la tête, suçoter en faisant du bruit mais pas
trop, et se délecter de cette chair fondante, telle est notre seule envie à ce
moment. A vrai dire tout notre cœur, notre corps et notre cerveau ne pensent
plus qu’à picorer d’une assiette à l’autre, à se délecter, la plupart du temps
avec les doigts, de ces petits plats. Qu’il est dommage que le service se termine
déjà, on serait bien resté là la nuit entière à enchaîner les assiettes et les
verres….c’est ça la gastronomie véritable et détendue.
Nous terminons par baragouiner
tant bien que mal avec le serveur, toute porte fermée, les sourires sont de
rigueur et terriblement authentiques, à l’image de cette adresse, et en plus ça
ne coûte rien, ce qui ne gâche rien.
Il m’arrive de manger
entre 12 et 36 étoiles par an depuis 10-20 ans, je mange de très belle choses
bien souvent le reste du temps, mais cette heure passée ici restera gravée très
longtemps dans mes souvenirs épicuriens, c’est certain. Si un jour je reviens à
Barcelone, je m’enferme là-bas pendant 2h. au moins, le « matin »,
vous faites ce que vous voulez, mais passer à côté de cette adresse c’est passer
à côté d’une bonne part de Barcelone.
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